
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation : mon rapport pour 2021
La mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation, dont je suis le rapporteur spécial, finance les actions de reconnaissance en faveur du monde combattant, les politiques de renforcement du lien entre l’armée et la Nation et l’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde guerre mondiale.
Je tiens d’abord à saluer certaines avancées. En ce qui concerne la jeunesse, la hausse de la cible d’incorporation du service militaire volontaire, dispositif qui a prouvé son efficacité, est satisfaisante. Par ailleurs, les crédits dévolus à la politique de la mémoire augmentent nettement. Cette hausse bénéficie principalement à la rénovation et à l’aménagement des sépultures de guerre et des hauts lieux de la mémoire nationale en France, en Algérie et au Maroc, comme par exemple le camp de concentration du Struthof. Je ne peux que me féliciter de cet effort conséquent qui permettra de conserver ces lieux de transmission dans un état convenable.
Cette année encore, cependant, les crédits de la mission sont en baisse : en diminution d’environ 3 %, ils sont désormais légèrement inférieurs à 2,1 milliards d’euros. Si cette chute est pour partie la conséquence de la diminution du nombre de bénéficiaires de la retraite du combattant et de la pension militaire d’invalidité, les économies ainsi réalisées auraient dû servir à renforcer les actions en faveur du monde combattant. Je déplore que cela ne soit manifestement pas le cas.
La déception est d’autant plus forte qu’en 2020, le monde combattant a été durement éprouvé par la crise sanitaire : d’une part, parce que ceux qui le font vivre sont souvent des personnes d’un certain âge ; d’autre part, parce que l’annulation prolongée des commémorations traditionnelles, hors format numérique ou groupe restreint, a mis un coup d’arrêt brutal au travail de transmission mené par les anciens combattants, mais a également fait disparaître des moments essentiels de la vie sociale. En 2021, plus encore qu’auparavant, les attentes des anciens combattants et de leurs familles sont donc fortes et légitimes.
Or, la seule mesure de revalorisation prévue cette année consiste en l’abaissement du seuil d’invalidité nécessaire à l’obtention de la majoration de la pension de réversion du conjoint survivant d’un grand invalide. Le dispositif ne devrait pas concerner plus de 197 personnes et son coût, probablement surévalué puisqu’il suppose qu’à tout grand invalide survivrait un conjoint, ne dépassera pas le million d’euros. Cette mesure était attendue, mais manque d’ambition ; je propose donc un amendement d’appel visant à étendre le nombre de ses bénéficiaires.
Surtout, l’amélioration proposée ne peut pas, à elle seule, masquer la faiblesse d’engagement de ce budget pour 2021, particulièrement en ce qui concerne la retraite du combattant. Alors que la dernière revalorisation remonte à 2017, et tandis que les crédits dédiés à cette seule action baissent de 15,5 millions d’euros, il n’est pas compréhensible que la faible somme perçue chaque année par un ancien combattant continue de plafonner. Je propose donc un amendement visant à l’augmenter d’un point d’indice, pour un coût inférieur de 6 millions d’euros aux économies réalisées sur cette seule action.
Je note également une revendication montante à laquelle il serait souhaitable de donner suite et qui concerne la demi-part fiscale supplémentaire attribuée aux anciens combattants et à leur veuve. L’extension de cette demi-part aux veuves de plus de 74 ans d’un bénéficiaire de la retraite du combattant décédé avant son soixante-quatorzième anniversaire, prévue par la loi de finances pour 2020, entrera en vigueur le 1er janvier 2021. Cependant, les veuves dont le mari, titulaire de la carte du combattant, est décédé avant 65 ans, donc avant d’avoir bénéficié de la retraite du combattant, ne pourront toujours pas demander cette demi-part supplémentaire. J’insiste sur le fait que cette inégalité de traitement n’est pas acceptable et qu’il sera nécessaire, dans la continuité de ce que nous avons voté l’an dernier, de faire disparaître cette double peine dont sont affligés ces conjoints survivants d’anciens combattants précocement disparus.
Enfin, si les crédits accordés à l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre sont en augmentation, celle-ci n’est qu’apparente après une année 2020 qui avait donné lieu à un important prélèvement. Par ailleurs, la trésorerie de l’ONAC-VG participera cette année, pour plus de 2 millions d’euros, aux actions en faveur des harkis et rapatriés. Certes, les réserves actuelles de l’office le permettent, mais sa mise à contribution ne pourra pas se poursuivre éternellement.
En effet, si l’ONAC-VG se réorganise pour s’adapter à la baisse du nombre de ses ressortissants, il doit conserver un maillage territorial satisfaisant et une présence suffisante dans ses antennes départementales. Ses missions sont en effet toujours aussi essentielles, à l’image de l’accompagnement des Pupilles de la Nation dont le nombre est malheureusement en augmentation du fait des attentats terroristes qui frappent la République depuis plusieurs années. La baisse réelle du budget de l’office ne pourra donc pas se poursuivre indéfiniment sans effets délétères sur la proximité avec ses ressortissants.