
Les synthèses
T1 – HABITER UN TERRITOIRE
Sur le thème « Habiter sur un territoire », les quatre ateliers ont été animés par Philippe DENIS et rapportés par Nicolas PRESSICAUD. Ils ont eu lieu le 25 mai à Avermes, le 28 mai à Verneuil-en-Bourbonnais, le 4 juin à Bourbon-l’Archambault et le 20 juin à Dompierre-sur-Besbre.
La réflexion sur la notion « d’habiter un territoire » repose sur la définition de la politique de logement plus juste, telle qu’elle est voulue par les participants aux ateliers. Il s’agit de déterminer comme adapter l’offre d’habitat aux besoins individuels et collectifs de ceux qui vivent sur ces territoires ruraux ou le désirent. Elle doit permettre une réhabilitation des centres-bourgs et autres atouts du parc immobilier propre aux milieux ruraux. Surtout, elle doit pouvoir proposer un cadre de vie qualitatif pensé avec une vision globale. L’offre de services publics et au public doit être a maximaetde qualité. Pour rendre les territoires attractifs, elle ne peut être réfléchie autrement que dans la proximité et en englobant les différents besoins. Ainsi, il faut penser de manière durable cette redéfinition de l’offre de vie en territoire rural, en intégrant des paramètres essentiels comme les commerces, la mobilité ou l’apport du numérique. Toutes ces variables qui conditionnent la qualité de l’habitat ont été abordés lors des ateliers de circonscription.
REDÉFINIR UNE POLITIQUE DU LOGEMENT MIEUX ADAPTÉE AUX BESOINS
Le logement paraît être la première problématique de la notion « d’habiter » sur un territoire. Plus qu’une marchandise répondant à une loi de l’offre et de la demande, le logement est à considérer comme un droit fondamental. Son accessibilité doit ainsi être généralisée, sans que cela ne soit une contrainte pour personne. Se pose alors les questions des garanties pour les personnes aux situations les plus précaires, celles qui sont sans emploi ou avec des contrats courts ou un travail à temps partiel : ce sont ces gens qui ont le plus de difficultés face à l’accès au logement. Les bailleurs sociaux doivent apporter des solutions quand l’investissement privé dans le logement est insuffisant, comme c’est souvent le cas dans les milieux ruraux.
Or, l’offre locative n’est pas toujours adaptée à la demande. Il faut donc prendre des mesures incitatives de mise en locatif de biens immobiliers en fonction de résultats d’études réalisées localement, au plus proche des territoires ruraux pour en connaître les véritables besoins. Face au grand nombre de personnes en recherche de logement, se pose la question de la quantité de foncier inhabité. Il semble ainsi nécessaire de mobiliser le parc immobilier en généralisant, par exemple, les taxes sur la vacance. Il est primordial de soutenir encore plus la rénovation énergétique des habitats, pour protéger économiquement les foyers de manière durable, et dans un souci de protection environnementale.
REVITALISER DE MANIÈRE GLOBALE LES CENTRES-BOURGS
Il faut penser les projets de réaménagement des centres-bourgs avec une véritable approche urbanistique générale qui inclut non-seulement la voirie et l’aménagement des espaces mais aussi la rénovation des façades, l’image renvoyée, le fleurissement ou encore l’offre de commerce. La revitalisation des bourgs doit pouvoir leur donner un « cœur de vie ».
Est évoquée la valorisation des grandes bâtisses des centres-bourgs pour en faire des espaces de vie intergénérationnels ou des logements à destination des personnes âgées avec des services communs. La présence de services de proximité et d’infrastructures partagées et adaptées pour les personnes du 4eâge dans les bourgs est un atout qui leur facilite la vie au quotidien en empêchant leur isolement. Le financement de la rénovation et de la transformation de ces bâtiments permet ainsi de valoriser les centres-bourgs et de créer du logement à vocation sociale. Cela s’inscrit ainsi dans la priorisation de la rénovation de l’habitat ancien pour le mettre en valeur et encourager la mixité sociale.
Il semble aussi important d’être en mesure d’offrir le « besoin de campagne » aux habitants des centres-bourgs. La volonté de vivre en milieu rural s’accompagne généralement d’une recherche d’espaces verts entourant l’habitation, conception généralement contraire à l’aménagement des bourgs aujourd’hui, dont certains édifices sont parfois en état de délabrement et potentiellement dangereux pour les constructions avoisinantes. La revitalisation des centres-bourgs passe par un réaménagement global de l’espace pour que les constructions ne pouvant être rationnellement réhabilitées puissent laisser la place à des espaces de verdure de proximité.
REDÉVELOPPER UNE OFFRE DE SERVICES PUBLICS ET AU PUBLIC DE PROXIMITÉ
En milieu rural aussi, les besoins de services existent. Ce rappel pourrait paraître anodin si l’offre scolaire, de services à la petite enfance, médicale, de services publics, de commerces, de services bancaires, postaux ou de télécommunications était à la hauteur de ces besoins. Les fermetures successives de classes, de bureaux de poste, de supérettes, d’agences bancaires, les non-remplacements de médecins partant à la retraite sont l’illustration du manque de politiques générales pour la défense de la ruralité.
Les territoires ruraux dénudés de services souffrent d’un manque évident d’attractivité. Ces services sont en effet un besoin crucial pour les personnes âgées ou avec peu de moyens de locomotion, qui sont généralement les personnes les plus vulnérables, les plus précaires et qui n’ont pas forcément les moyens d’habiter en agglomération. La solidarité rurale doit permettre de ne pas les marginaliser de la société en appuyant leur intégration via la présence des mêmes services sur tout le territoire. Par exemple, les écoles et RPI doivent être maintenus de manière à ne pas imposer aux enfants des trajets trop longs au quotidien.
Il semble ainsi manquer une vision plus générale, qui permette d’englober plusieurs domaines d’action. La mutualisation des services au sein de points centraux d’équipements semble nécessaire pour un maintien suffisant, mais il faudrait pouvoir le penser au-delà d’une simple rationalisation de chaque champ d’action. Il s’agit alors d’inscrire cette volonté dans le cadre de schémas territoriaux plus globaux, plus structurants, avec une mobilité des services facilitée entre les territoires ruraux. Le maillage du territoire doit être plus important en renforçant la pluriactivité, de manière plus transparente et en mettant les citoyens au cœur du processus décisionnel.
La répartition territoriale des professions médicales (médecins, infirmières, kinés, pharmacies, etc.) est à améliorer rapidement. Il devient urgent d’enrayer la tendance d’une plus forte mortalité prématurée en milieu rural : il s’agit là d’une question d’égalité nationale.
SOUTENIR LA VIE LOCALE ET LA MOBILITÉ
Pour soutenir les ruralités, il est urgent de garantir les budgets des communes et autres collectivités territoriales. La ruralité doit être pensée a maxima, et les besoins différenciés des territoires ruraux ne peuvent en rien justifier le manque d’investissement actuel de l’Etat.
Les collectivités territoriales au plus proche des territoires peuvent aider les projets innovants et/ou communautaires de services, de commerces, ou encore d’agriculture. Cela permet ainsi d’encourager les initiatives qui favorisent l’esprit collectif de « vivre-ensemble », d’accueil et de solidarité des territoires et qui participent à leur attractivité.
La mobilité du quotidien ne peut être sacrifiée. Les prix du carburant flambent alors que l’automobile est nécessaire en milieu rural. Face au manque structurel d’alternatives de mobilité, les habitants des territoires ruraux ne peuvent être pénalisés au même titre que les citadins sur les prix à la pompe.
Les alternatives de transports (bus, transport à la demande, autopartage, covoiturage…) doivent en parallèle être soutenues en les rendant plus efficaces et mieux connues des usagers pour mieux les adapter aux besoins réels. Pour cela, il est nécessaire de sonder et d’évaluer comment accompagner les projets de mobilité des habitants des territoires ruraux en leur permettant d’avoir un accès facilité aux informations de fonctionnement. Les progrès techniques et les changements de modèle économique du milieu automobile ne doivent pas être laissés pour compte. L’électrification, l’autonomisation ou encore la mise en partage des voitures de demain offrent des pistes qui pourront à l’avenir aider à la mobilité un plus grand nombre de citoyens.
Les modes de transports doux sont à mettre au cœur des politiques locales de mobilité pour participer à l’effort collectif de protection de l’environnement. Les solutions dans ce domaine sont nombreuses et connues mais ne sont que peu mises en application. On peut ainsi citer le réaménagement des bourgs pour les piétons, l’encouragement à l’utilisation du vélo avec la présence de pistes cyclables sécurisantes et prioritaires en petites et moyennes villes ou encore la généralisation des aides à l’achat des vélos à assistance électrique pour permettre au plus grand nombre de se déplacer ainsi.
L’éloignement géographique ne doit plus autant être une contrainte. Les agglomérations proches, souvent chefs-lieux de régions sont parfois à des temps de trajets bien trop élevés. Il est inconcevable que des politiques actuelles viennent aggraver cette situation. Le manque d’investissement pour le maintien et la rénovation des infrastructures ferroviaires a conduit à la dégradation de qualité du service et à l’augmentation de certains de temps de trajets. Les gares et lignes de proximité doivent être protégées et développées, pour répondre de manière proche aux besoins. Les projets de tronçons et contournements routiers ou autoroutiers des agglomérations doivent être soutenus pour favoriser la proximité et la sécurité. L’argent des revenus de infrastructures routières (péages, taxes, radars) doit revenir à l’entretien, au développement et à la sécurisation des transports.
RÉINSCRIRE LES COMMERCES DANS LA PROXIMITÉ
Le repli vers les zones commerciales péri-urbaines s’explique par de nombreux facteurs : on y trouve plus de choix dans l’offre, des prix plus avantageux, des services à l’image des « drives » les rendant plus efficaces, un stationnement moins contraignant et gratuit – contrairement à ce qui se fait souvent dans les centres des villes de taille moyenne – ou encore la présence de stations-services généralisant l’usage de la voiture.
Cette évasion commerciale nuit à la présence de négoces de proximité dans les milieux ruraux pourtant essentiels pour satisfaire les besoins courants de consommation des personnes âgées et personnes sans voiture. Il semble nécessaire de maintenir des commerces de proximité en obligeant par exemple les groupes de la grande distribution à avoir une présence rurale ou encore les centrales d’achat à pratiquer des tarifs équivalents à ceux des grandes surfaces. Les circuits courts sont à valoriser pour permettre de faire vivre les commerces ruraux. Ces derniers doivent devenir des vitrines de l’artisanat et des produits locaux, des produits labelisés créateur de valeur ajoutée. L’Etat doit en être partenaire en aidant économiquement et financièrement à l’installation et au maintien de ces infrastructure essentielles aux milieux ruraux. Cela passe aussi par un encouragement des initiatives alternatives comme les monnaies locales, qui apportent peut-être des solutions face au repli vers la grande distribution.
RENFORCER LA PRÉSENCE DU NUMÉRIQUE POUR EN RÉCOLTER LES FRUITS
L’apport du numérique en milieu rural est essentiel. Il est urgent d’enrayer les zones blanches et au-delà de développer le plus rapidement possible les avancées technologiques (fibre, 4G et bientôt 5G) pour ne pas avoir à colmater les brèches des années plus tard. Les territoires ruraux ne doivent pas être oubliés des politiques de développement numérique et ne pouvoir profiter des bénéfices que bien plus tard.
Le numérique permet aux personnes qui vivent du télétravail et autres métiers dématérialisés de pouvoir vivre en milieu rural sans avoir à se poser la question de l’accès aux services internet. Si la présence de dispositifs numériques est un outil d’attractivité des territoires, leur absence crée une brèche majeure qui enclave encore plus les territoires.
Le numérique est également utilisé dans la prévention médicale. On peut citer l’exemple actuel de Cardiauvergne, outil infirmier de télésurveillance des personnes cardiaques. La généralisation de ces services est essentielle.
CONCLUSION
Les problématiques qui ressortent des ateliers de circonscription laissent apparaitre une absence de plus en plus remarquée de la notion de proximité dans les politiques d’habitats. En milieu rural, l’offre de vie est altérée par l’éloignement des services et des commerces suites aux fermetures successives des plus proches. Les territoires ruraux paraissent souffrir de la déconnexion des infrastructures de transports et du numérique, et des baisses de dotations de l’Etat qui ne permettent plus de soutenir la vie locale. Il est urgent d’enrayer cet abandon en remettant la ruralité au cœur des politiques publiques pour développer leur attractivité de manière durable et mieux répondre aux enjeux majeurs des territoires de demain.
T2 – TRAVAILLER SUR UN TERRITOIRE
Sur le thème du travail, les quatre ateliers ont été animés par François KARINTHI et rapportés par André LACARIN. Ils ont eu lieu le 19 juin à Avermes, le 25 juin à Verneuil-en-Bourbonnais, le 29 juin à Bourbon-l’Archambault et le 2 juillet à Dompierre-sur-Besbre.
Les participants aux divers ateliers « travailler sur un territoire » ont pointé les nombreuses problématiques qui encadrent aujourd’hui l’emploi en milieu rural. La situation est inquiétante sur les questions d’attractivité, de maintien des jeunes, de précarité des agriculteurs, d’occupations des emplois de santé… Pour autant, les participants ont également relevé qu’ici et là émergent des initiatives innovantes ou des activités de niche qui ne demandent qu’à se développer. Les territoires ruraux ont plus que jamais besoin du soutien de la puissance publique pour capter des emplois nouveaux, des futurs métiers ou d’autres modes de travail. Il faut aussi adapter la formation aux besoins du territoire pour développer des filières d’excellence, connecter les jeunes aux entreprises locales ou pour valoriser des métiers en tension qui souffrent d’un déficit d’image.
VALORISER LES FILIÈRES AGRICOLES, POUMONS DES RURALITÉS
Pour permettre le développement des territoires, il faut pouvoir en protéger les acteurs agricoles, en tenant compte des coûts de production pour permettre leur viabilité. Les aides doivent être significatives et dans un objectif de valorisation qualitative de l’agriculture. Il est essentiel de permettre aux exploitations agricoles d’être viables. La création de plus-value est une priorité pour défendre l’agriculture. Les produits locaux et de labels sont à valoriser avec un soutien à la vente directe et à la consommation locale. Cela passe par le financement des initiatives de ventes locales, qui permettent les circuits courts. La restauration collective, les commerces ruraux doivent devenir les vitrines de la production agricole locale qualitative.
Il est essentiel d’encourager les productions d’énergies renouvelables comme les unités de méthanisation. Les filières bois dont les ressources sont importantes dans les territoires ruraux sont à mettre en valeur également. Les territoires ruraux sont les espaces sur lesquels les forêts, les structures éoliennes s’inscrivent dans des filières qui peuvent être structurées au plus proche des ruralités.
Ainsi, les projets innovants de modernisation du secteur agricole (méthanisation, circuits courts, organisation des filières, etc.) doivent pouvoir être mieux accompagnés, afin d’améliorer la création de valeur ajoutée de la filière.
Il est nécessaire de pouvoir encore plus (in)former le consommateur à une consommation locale, éthique, écologique et saisonnière, pour pouvoir l’intégrer à l’économie circulaire et aux circuits courts qui font vivre les territoires ruraux.
La transition écologique offrira de nouvelles formes d’emploi, et il est impensable que les ruralités ne soient pas au cœur de sa mise en application.
UN FINANCEMENT DU TISSU VITAL DES RURALITÉS
Il est nécessaire de favoriser l’accompagnement des projets innovants. L’investissement public doit pouvoir au moins autant aider les petites entreprises locales aux actions plus ciblées, que les « grands projets » dont les créations d’emplois ne compensent pas toujours les suppressions indirectes qu’elles causent. Les porteurs de projets endogènes doivent être accompagnés, car ce sont leurs actions qui font vivre le territoire.
Les ruralités peuvent ainsi devenir le terrain de développement des lois expérimentales de l’emploi, comme celle des Territoires Zéro Chômeurs de Longue Durée qui permet la création d’Entreprises à But d’Emploi.
Pour cela, il est urgent d’arrêter la baisse des dotations aux collectivités territoriales dont la première conséquence est l’inégal financement des territoires urbains et ruraux. Il est nécessaire de rééquilibrer les grands investissements nationaux pour qu’ils ne soient plus concentrés vers les métropoles. La casse subie des services de proximité va dans le sens contraire du principe constitutionnel d’organisation décentralisée de la République française.
UNE MEILLEURE CONNEXION NERVEUSE DES TERRITOIRES ENCLAVÉS
Il est aujourd’hui nécessaire d’accélérer la connexion des territoires ruraux aux grandes infrastructures ferroviaires, routières et numériques.
Les territoires ruraux ont été oubliés dans des grands plans ferroviaires concentrés autour des LGV. Le service s’est détérioré sur de nombreuses lignes moins rapides et à la desserte plus locale. Il est primordial de connecter les territoires ruraux aux capitales régionales, maillage de métropoles du territoire national. Le service de ceux qui n’ont pas le droit au TGV ne doit pas pour autant être en-deçà : il en va de l’égalité dans son sens le plus strict, l’égalité républicaine passe par l’égalité des territoires.
De la même manière, il est parfaitement anormal que la modernisation des routes pointées comme dangereuses depuis des décennies soit aussi longue à mettre en place.
Il faut permettre à tous d’atteindre les services numériques de Très Haut Débit, qui sont essentiels au développement de toute activité professionnelle contemporaine, principalement de celles qui reposent exclusivement ou presque exclusivement sur des activités numériques, et qui sont ainsi plus facilement délocalisables des métropoles, pour condition que l’accès au numérique ne soit jamais une contrainte. La plupart des jeunes auront demain un métier qui n’existe pas aujourd’hui. Il est de la responsabilité des territoires ruraux de ne pas rater le coche, et de favoriser l’implantation de ces emplois d’avenir. Des secteurs entiers sont à capter par les ruralités car ils les concernent en premier point : l’apport des nouvelles technologies dans les filières agricoles, dans le domaine de la transition écologique ou celui des services à la personne sera toujours plus important, et il est essentiel d’y intégrer les acteurs concernés en milieu rural.
UNE ATTRACTIVITÉ TERRITORIALE QUI REMET LE TRAVAIL ET L’HUMAIN AU CŒUR DU PROJET RURAL
Pour permettre le développement des activités professionnelles en territoires ruraux, le désenclavement doit s’inscrire dans une recherche d’attractivité. L’attractivité pour les territoires ruraux doit passer par un apprentissage des réalités. Cet apprentissage s’apprend dans tout le cursus d’éducation des élèves. Les collégiens doivent se sentir connecter à leur territoire et aux entreprises qui l’animent. La scolarité doit pouvoir mieux intégrer ce rapport aux entreprises locales, pour montrer aux élèves les possibilités qui les entourent. Il faut donner envie aux jeunes travailleurs de revenir dans leurs territoires ruraux après des études en milieux urbains.
Le tourisme ne doit jamais être négligé par les territoires ruraux car il est un potentiel de développement conséquent. L’image des territoires doit pouvoir être travaillée avec les moyens adaptés, et en connectant les acteurs entre eux. La diversité du patrimoine des ruralités doit pouvoir être exploitée en développant les lieux de visites et festivals, en reliant les sites touristiques entre eux, en créant une véritable offre culturelle et touristique qui utilise et mette en valeur les territoires. La culture doit être plus décentralisée avec des moyens réels. L’aménagement du territoire et des infrastructures d’accueil doit pouvoir faire des territoires ruraux des terres d’accueil des cyclotouristes et autres pratiquants de formes de tourisme en développement. Une revalorisation de l’apprentissage est nécessaire, auprès des étudiants comme des entreprises. Les filières en apprentissage sont en difficultés, quand dans le même temps les filières plus généralistes sont dans l’impasse et incapables d’offrir des perspectives d’études à tous les jeunes. Des mesures incitatives à l’emploi d’apprentis plus fortes doivent être prises, peut-être allant jusqu’à la mise en place pénalités pour les mauvais élèves. L’enseignement supérieur doit revaloriser ses filières professionnalisantes car elles font vivre les territoires ruraux.
LA SANTÉ DOIT FAIRE VIVRE EN RURALITE AUSSI
La santé publique en milieu rural est marquée par de nombreux emplois vacants, et certaines professions médicales offrent des postes sous-payés, où les conditions de travail sont souvent difficiles. Ce sont des emplois non-délocalisables et en nombre croissant dans les milieux ruraux qui connaissent un vieillissement de leurs populations. Il convient de protéger les professions de santé car il s’agit d’une politique de santé publique.
Les ateliers de circonscription du thème 4 sont consacrés à la santé.
CONCLUSION
Les problématiques qui ressortent du thème « Travailler sur un territoire » mettent en exergue un constat bien connu de tous : le travail en milieu rural se raréfie. Il y a nécessité à rééquilibrer les territoires grâce à un modèle de développement qui prend en compte tous les potentiels, qu’ils soient urbains ou ruraux. Or, les pouvoirs publics continuent d’« arroser là où c’est mouillé » c’est-à-dire d’encourager l’émergence de méga-métropoles qui concentrent tous les emplois et vident nos campagnes. Il est urgent de repenser les dynamiques de l’emploi en milieu rural et de mener une politique d’aménagement des territoires qui accompagne véritablement le développement économique de tous les territoires. Cela nécessite une approche plus territorialisée des objectifs à se fixer pour corriger les déséquilibres.
T3 – VIVRE SUR UN TERRITOIRE
Sur le thème « Vivre sur un territoire », les quatre ateliers ont été animés par Marie-Jo Fillère et rapportés par Mireille Pasquel. Ils ont eu lieu le 17 septembre à Avermes, le 24 septembre à Varennes-sur-Allier, le 1eroctobre à Bourbon-l’Archambault et le 8 octobre à Dompierre-sur-Besbre.
Pour les participants, la définition du « vivre sur un territoire » repose sur différentes approches qui incluent des notions de démocratie participative, de culture, de vie associative, de solidarité et de relation à l’Autre. Le besoin de se rencontrer se fait largement sentir en ville comme dans les villages où certaines personnes, notamment les plus âgées, peuvent souffrir d’isolement. Tout comme le besoin de s’impliquer, de devenir acteur et de prendre part aux décisions qui concernent un territoire. Le succès de plusieurs initiatives de revitalisation montre la volonté des populations à participer à tout élan de solidarité susceptible de redonner vie à un village. Aujourd’hui plus que jamais, les notions d’ « intérêt général » et de « cause commune » semblent prendre tout leur sens en milieu rural. Un espoir pour nos territoires qui ont des atouts à faire valoir et à défendre ensemble.
RENFORCER LE TISSU ASSOCIATIF POUR RECRÉER DU LIEN SOCIAL ET RÉPONDRE AUX ENJEUX ÉCONOMIQUES
Chacun sait que la vie associative est un pilier du « bien vivre » et du « vivre ensemble » mais c’est particulièrement vrai en milieu rural où elle a un rôle incomparable. Elle y est un acteur majeur du dynamisme territorial et de la lutte contre l’isolement. Pour autant, le dynamisme associatif n’est pas le même d’une commune à une autre. Il est donc essentiel de valoriser le travail des associations, y compris en favorisant l’emploi associatif.
Les associations contribuent à la cohésion sociale de multiples façons. Pour commencer, elles entretiennent les réseaux de relations au sein de la commune, favorisent la connaissance de l’autre et l’apprentissage de la vie collective. Elles font des communes des lieux animés où chacun peut s’impliquer. De plus, en portant des projets collectifs, elles dépassent les problématiques personnelles et inscrivent la commune comme une entité sociale globale et fédératrice.
Les associations sont également une réponse à un constat alarmant : plus les gens sont isolés, plus ils s’appauvrissent et plus ils se sentent exclus. Des dispositifs comme « Territoire zéro chômeur de longue durée » ou la présence des centres sociaux sont à encourager pour lutter contre toute forme de précarisation et de relégation. Les centres sociaux sont particulièrement adaptés aux besoins des populations des territoires ruraux où ils sont implantés. Grâce à des personnels formés, ils rendent des services à la population, créent les conditions pour renouer des liens sociaux et soutiennent les projets qui animent le territoire. Il convient donc pour les politiques publiques de sécuriser et pérenniser les financements des centres sociaux.
D’autres associations constituent un véritable pivot de la vie communale : clubs sportifs, comités des fêtes, clubs du 3eâge, associations de parents d’élèves… Toutes sont un outil précieux de revitalisation et de dynamisation des communes. Mais la diversité des associations ne s’arrête pas là. Les SEL (Système d’Échange local), les accorderies, les jardins partagés, les groupes de protection de la nature… contribuent à une autre facette de la dynamique associative en proposant des réponses alternatives aux enjeux socio-économiques des territoires.
Il est à noter que les associations sont également des employeurs, en particulier en milieu rural et dans le secteur sanitaire et social. Dans un département comme la Lozère qui compte de grosses structures associatives, la proportion est d’un salarié associatif pour trois salariés privés. Il est donc essentiel de se donner les moyens d’encourager l’emploi associatif sachant qu’il y a en zone rurale des secteurs majeurs d’activité, comme l’accompagnement des personnes âgées, qui demandent des services spécifiques parfois pris en charge par les structures associatives.
Il apparait également intéressant de faciliter la création de lieux innovants sur le modèle dans maisons de quartiers et des maisons de la culture qui pourraient s’appeler des « maisons d’initiatives collectives » où des personnels issus de différentes formations animeraient ces lieux ressources qui irrigueraient le territoire dans plusieurs domaines et en réponse aux besoins des habitants.
Le tissu associatif assure dans les territoires ruraux des fonctions majeures en termes de lien social, d’initiatives mais aussi de développement économique. Pour autant, il souffre d’un manque de reconnaissance notamment dans sa capacité à contribuer au développement du monde rural et à créer de l’emploi. Il faut donc faire un travail de sensibilisation et octroyer des moyens aux structures associatives, moyens qui ne viendraient pas uniquement des collectivités locales mais aussi d’un effort de redistribution de l’État.
DÉMOCRATISER LA DÉMOCRATIE
La demande est unanime en territoires urbains comme en territoires ruraux : il faut rapprocher les citoyens des élus. Pour les citoyens, plusieurs questions se posent : comment sortir de l’élu « potentat », comment se faire entendre, comment s’impliquer ? Quel système de dialogue, d’« allers-retours », peut-on instaurer pour que la concertation soit automatique et que la prise de décision sur certains sujets soit partagée ?
Aujourd’hui, les décisions sont le plus souvent prises au niveau des exécutifs sans informer ni demander l’avis des habitants. Pire, les lieux de décision ont tendance à s’éloigner des populations, comme c’est le cas avec la nouvelle grande région Auvergne-Rhône-Alpes qui concentre ses services sur la métropole lyonnaise. Or, les réalités du Rhône et celles de l’Allier sont très différentes et les réponses aux problématiques ou aux enjeux de territoires ne peuvent évidemment pas être les mêmes.
Favoriser la démocratie participative ne doit pas rester de l’ordre de l’utopie pour plusieurs raisons. Tout d’abord, elle permet de lutter contre la défiance qu’il existe envers les élus et contre leur stigmatisation. Ensuite, dans les petites communes, la fonction est parfois lourde à porter et les élus sont surchargés voire découragés.
Plus de démocratie vivante invite également les citoyens à s’engager dans les projets qui les concernent directement. Mais cette forme de démocratie peut aussi être déstabilisante pour les élus comme pour les citoyens. Rendre compte, proposer et ne plus déléguer, ne se font pas encore de façon spontanée.
Il faut donc instituer des outils de démocratie locale qui fixe les règles et les obligations sans pour autant imposer des contraintes supplémentaires artificielles et sclérosantes.
Pour faire vivre la démocratie, les territoires ruraux peuvent constituer un laboratoire intéressant en s’appuyant sur la proximité. La commune a toujours été considérée comme un échelon de proximité qui facilite les relations entre élus et citoyens. Pour autant, la participation citoyenne prend différentes formes selon la volonté de l’élu. Pour certains, il s’agit seulement d’informer. Ce droit à l’information est d’ailleurs consacré par la loi. Mais ce dont certains élus en milieu rural se préoccupent aujourd’hui c’est de la participation active des citoyens c’est-à-dire la contribution à l’élaboration d’un projet.
Certains élus ont analysé qu’encourager la participation des citoyens, c’est améliorer l’action publique. C’est également lutter contre l’abstention.
Aujourd’hui, lorsque la démocratie participative est favorisée c’est souvent de manière inventive et très variable d’un territoire à un autre : mise en place de budgets participatifs, de comités de pilotage, de conseils des aînés ou des jeunes, de commissions ouvertes aux élus et aux citoyens…
Il est intéressant de constater qu’en matière de démocratie participative, les pratiques de certains élus ont devancé la loi, considérant que l’implication de leurs administrés est nécessaire dans leur action publique et politique.
FAIRE DE LA RURALITÉ UN ATOUT POUR DEMAIN
Comme la participation active des citoyens est utile pour l’efficacité de l’action publique, elle contribue également à faire émerger l’identité d’un territoire. Les participants aux ateliers sont formels : leur campagne offre un cadre de vie agréable et compte plus d’un atout.
Un des atouts est la proximité. Celle-ci favorise les échanges entre personnes de compétences diverses et facilite la mise en place de projets. Elle est garante d’une vie à échelle humaine.
La proximité fait également bon ménage avec l’écologie. Les relations entre producteurs et consommateurs se font plus naturellement en milieu rural. Tout comme les circuits courts pour les cantines scolaires qui assurent une nourriture de qualité aux plus jeunes en lien avec le territoire sur lequel ils vivent.
Les monnaies locales, encore peu connues, favorisent aussi l’activité économique locale en redynamisant le commerce de proximité.
Enfin, la proximité facilite la mutualisation des moyens et la notion d’entraide. Les agriculteurs ont depuis longtemps inventé les CUMA pour l’achat, l’entretien et l’utilisation de matériel agricole. Les communes s’y mettent pour les travaux d’entretien, par exemple. Des espaces de coworking sont à créer ici et là pour permettre aux nouveaux métiers d’exister aussi en milieu rural.
Pour finir, pour avoir une planète propre, il faut des territoires ruraux car les campagnes rendent un service fondamental de purification de l’air. En effet, le C02 est absorbé par les herbes, les arbres et les plantes des zones rurales. Difficile à évaluer, ce service doit néanmoins être englobé dans une loi d’orientation et de programmation de la ruralité.
CONCLUSION
Les Français seraient de plus en plus nombreux à vouloir quitter la ville pour s’installer à la campagne. Mais ce désir de chercher une meilleure qualité de vie s’accompagne de besoins d’accès au numérique, de moyens de transport, d’une qualité de maillage des services de proximité et de travail localisé. Il va également de pair avec une offre associative riche et l’envie d’appartenir à un territoire. Or, les logiques actuelles des pouvoirs publics continuent à instaurer un principe de dotation de base particulièrement pénalisant pour les territoires ruraux, les privent de moyens et réduisent leurs marges de manœuvre. Il est urgent de regarder ces territoires par un autre prisme que celui d’une ruralité pauvre et de défendre une loi qui porte l’ambition de la ruralité.
T4 – LA SANTÉ
Sur le thème de la santé, les quatre ateliers ont été animés par Marie-Françoise LACARIN et rapportés par Christine DARD. Ils ont eu lieu le 6 juin à Avermes, le 11 juin à Dompierre-sur-Besbre, le 15 juin à Verneuil-en-Bourbonnais et le 6 juillet à Franchesse.
Lors de ces ateliers, les participants ont été invités à répondre à 3 questions :
– C’est quoi la santé pour vous ?
– Qu’est-ce qui dysfonctionne ?
– Sur quoi peut-on agir ?
La santé a été définie par les participants des ateliers comme un état de bien-être, ce qui correspond au sens donné par l’OMS (Organisation Mondiale de Santé). La santé dépasse l’état de « non-malade ». Les conditions de qualité de vie sont largement mises en avant, et permettent d’ouvrir la réflexion aux questions d’alimentation, de conditions de travail, d’urbanisme ou encore de pollution.
UNE DÉMOGRAPHIE MÉDICALE QUI NE RÉPOND PLUS AUX BESOINS
Le constat sur la démographie médicale est alarmant, et il a donc été au cœur des préoccupations des participants aux ateliers. En effet, même si le nombre de médecins s’est accru ces dernières années en France, la quantité de « déserts médicaux » a tout de même augmenté, à cause principalement d’un accroissement de la population et d’une moins bonne répartition des professionnels de santé. Il manque dans les territoires ruraux de généralistes comme de spécialistes, de médecins en cabinet comme à l’hôpital, les départs en retraite ne sont pas remplacés et l’âge moyen des médecins augmente. Dans les structures hospitalières et les EHPAD, le personnel soignant manque cruellement à tous les échelons. Il faut se déplacer de plus en plus loin et attendre de plus en plus longtemps pour obtenir un rendez-vous avec un spécialiste.
Le numerus claususest remis en cause par les participants des ateliers. Avec le temps de formation des médecins, il faut décider tôt du nombre de médecins nécessaires pour ne pas avoir à subir les conséquences de ces décisions 10 ou 15 ans plus tard. Certaines autres formations médicales comme les kinésithérapeutes sont également grandement déficitaires en milieux ruraux et les salaires proposés en milieu hospitalier public ne sont pas du tout à la hauteur de leur niveau d’études.
Les mesures incitatives à l’installation des médecins dans les zones déficitaires comme les aides existantes au niveau de l’assurance maladie ou du Département sont considérées comme à développer. Il peut même être envisagé de prendre des mesures contraignantes si les incitations n’étaient pas suffisantes pour mieux répartir les personnels de santé sur les territoires. La formation de médecins peut aussi intégrer de manière plus automatique un internat ou des périodes de stages en zones déficitaires.
DES BAISSES D’INVESTISSEMENTS CONTRAIRES AUX NÉCESSITÉS DES TERRITOIRES
Les suppressions de postes et de lits dans les structures de santé, voire de services entiers et d’établissements, vont dans le sens contraire de l’évolution démographique des territoires ruraux où le vieillissement engage une augmentation des besoins médicaux.
Les conséquences de ces fermetures sont dramatiques pour les services d’urgence, de plus en plus débordés et de plus en plus souvent incapables de faire face aux besoins. On met en danger la vie des patients et les cas de décès à la suite d’un défaut de prise en charge aux urgences se multiplient.
Il faut inverser la tendance : au-delà d’arrêter la casse faite dans les établissements hospitaliers qui ne permet plus aux personnels soignants de travailler convenablement, il faut réinvestir pour permettre d’embaucher à nouveau et de moderniser les établissements. Il faut au plus vite sortir de la situation actuelle dans laquelle infirmières et aides-soignantes travaillent en sous-effectifs dans des conditions exécrables pour des salaires trop bas.
UNE PRISE EN CHARGE ÉGALITAIRE À REPENSER DANS LA PROXIMITÉ
La proximité spatiale et temporelle doit être remise au centre de l’organisation médicale des territoires. Il faut permettre au malade d’avoir accès à des spécialistes proches et rapidement. La fermeture des maternités de proximité éloigne les femmes enceintes des lieux de naissance alors que le nombre de naissances prématurées et autres complications de grossesse augmente. Il faut pouvoir répondre aux besoins spécifiques des territoires en fonction de leurs populations. Les milieux pauvres, ceux très exposés à la pollution industrielle ou encore ceux très vieillissants n’ont pas les mêmes nécessités.
La santé doit rester un droit primordial indépendant de son milieu géographique, social et de ses moyens. Les inégalités face aux coûts de la santé doivent être minimisées, et l’Etat doit assurer à tous un accès égal aux soins, sans que les déremboursements, retenues diverses, dépassements d’honoraires ou encore les coûts de transports ne puissent mettre en cause la prise en charge médicale. Le coût de la santé ne doit pas se répercuter différemment selon les individus, leurs moyens et leurs besoins de prise en charge. La santé ne doit pas être commercée, et les territoires ruraux doivent pouvoir profiter de ce qui doit être une solidarité nationale tout autant que les métropoles plus actives, plus aisées et plus cotisantes. L’accomplissement de la solidarité nationale des territoires en matière de santé serait une garantie de prise en charge à 100% par la sécurité sociale. Les milieux ruraux plus pauvres et plus âgés ne seraient plus dépendants des assurances privées, qui ne tiennent pas compte des ressources et dont le coût augmente avec l’âge. Pour définir l’accès à la santé comme un droit fondamental, celle-ci ne doit pas être en quête d’une quelconque rentabilité. Ainsi, la mise en concurrence entre établissements de santé et la course à l’acte médical, conséquences de la tarification à l’acte, vont dans le sens contraire de la solidarité voulue pour tous les territoires face à l’accès au bien-être.
La perspective sociale de la prise en charge médicale doit pouvoir être reconnectée à l’aspect sanitaire. Les personnels soignants en sous-effectifs ne sont plus disponibles pour humaniser et globaliser le traitement du malade. L’accompagnement est de moins en moins possible dans un contexte de retour à domicile de plus en plus rapide.
UNE PRÉVENTION À REMETTRE EN PRIORITÉ
Les inégalités face à la santé sont très importantes. Jouer sur la prévention et l’éducation à la santé permettrait d’en diminuer les effets. Il faut redéfinir qui a le rôle de prévention, et y mettre les moyens matériels, humains et financiers. Les personnels soignants doivent retrouver une place dans les écoles et collèges, cadres de vie des plus jeunes et lieux d’éducation à la santé. L’éducation à la santé permet d’éviter la défiance généralisée, à l’image de celle installée envers les vaccins.
L’éducation à l’alimentation doit pouvoir s’accompagner par un accès à des ressources alimentaires saines et de qualité. C’est une question importante dans les foyers des milieux ruraux, souvent défavorisés financièrement. Il faut pouvoir garantir au consommateur une qualité alimentaire, alors même qu’il vit sur les territoires de production. Il faut permettre au consommateur de contrôler ce qu’il mange. Pour en améliorer la qualité, il est essentiel de favoriser les circuits courts, bénéfiques à tous et permettant un meilleur contrôle de la provenance jusque dans les restaurations collectives qui touchent l’ensemble de tranches de la société.
La prévention passe aussi par l’appropriation des nouveaux outils du numérique. L’exemple de CARDIAUVERGNE, outil qui permet aux infirmiers un contrôle des résultats des patients insuffisants cardiaques, en renforçant la coordination des soins, la surveillance et l’éducation.
UN DÉVELOPPEMENT DES NOUVELLES POLITIQUES D’INSTALLATION DES PERSONNELS DE SANTÉ
Les maisons de santé constituent une avancée certaine pour les patients et les praticiens. Elles permettent une nouvelle dynamique en matière d’offre de soins et sont plus attractives pour les médecins – notamment les jeunes – qui n’aspirent plus à travailler seuls dans leur cabinet. Il faut donc continuer à accompagner les créations de maisons médicales et d’établissements de santé de proximité. Aujourd’hui, ces structures sont le plus souvent à l’initiative des collectivités locales. Il faut que l’Etat soit capable de soutenir la création de telles infrastructures, pour encourager les médecins à s’installer dans les zones déficitaires, créant une dynamique autour des maisons de santé pour les autres professions de santé.
De plus en plus de jeunes médecins ne veulent plus s’installer comme indépendants. Les maisons de santé ont l’avantage d’offrir aux médecins une certaine liberté de statut professionnel, leur permettant de choisir entre être travailleur libéral ou salarié de la commune, du centre de santé, d’un confrère ou d’un établissement hospitalier et mis à disposition de la commune. Cette liberté doit être encouragée, et l’Etat doit être en mesure de proposer aux médecins généralistes un statut salarial de la fonction publique pour ceux qui le désirent.
L’exercice en maison de santé ne règle néanmoins pas le problème des visites à domicile. Les médecins se déplacent de moins en moins et la prise en charge des patients âgés ou qui ne peuvent se déplacer reste problématique.
DES BESOINS EN INFRASTRUCTURES D’ACCUEIL DES PERSONNES ÂGÉES PLUS IMPORTANTS DANS LES MILIEUX RURAUX
Les territoires ruraux connaissent un vieillissement de leurs populations dû à l’âge actuel des personnes nées après-guerre, et à l’accroissement de l’espérance de vie, particulièrement en milieu rural. Les structures sont en nombre insuffisant et on observe des listes d’attente dans chaque établissement. Les personnes admises en EHPAD sont de plus en plus âgées, et le personnel soignant est trop peu nombreux pour faire face à des soins plus complexes et plus longs. Les difficultés d’embauche laissent les employés en sous-effectifs, dégradant fortement leurs conditions de travail, ajoutant des contraintes de remplacements, et compliquant ainsi encore plus la tâche de recrutement. Les conditions de vie des résidents sont moins bonnes, les budgets sont insuffisants, les personnels surmenés et sous-payés. Il est dans de telles conditions de plus en plus difficile d’accompagner les résidents dans un projet de vie, de faire autre chose que des soins nécessaires au maintien en vie.
Dans le même temps, le coût de l’hébergement en EHPAD est disproportionné par rapport aux ressources des résidents vulnérables et doit presque systématiquement reposer sur une solidarité familiale contrainte. Il y a là encore une recherche de rentabilité contraire à la solidarité nationale des personnes âgées, plus nombreuses en milieu rural.
UNE REDÉFINITION LOCALISÉE NÉCESSAIRE DES POLITIQUES DE SANTÉ
La lourdeur du cadre réglementaire des Agences Régionales de Santé et leur système pyramidal sont dénoncés par les présents aux ateliers. Les politiques de santé sont des enjeux de territoires, de bassins de vie, et non de grandes régions administratives dans lesquelles les milieux ruraux et métropolitains n’ont pas les mêmes besoins. L’organisation de l’offre de soins et de la prévention doit être pensée par bassin de vie, y compris avec des départements limitrophes hors région, afin d’éviter les incohérences territoriales relevées dans le domaine de la santé, comme par exemple l’accueil en EHPAD.
CONCLUSION
Il apparait aujourd’hui plus que jamais nécessaire de remettre l’humain au centre des politiques de santé, de les reconnecter à tous les territoires. La santé manque de moyens humains, matériels et financiers, particulièrement dans les territoires ruraux. Les politiques de santé doivent se recentrer sur la prévention et se libérer des milieux pharmaceutiques, assurantiels et de l’industrie agro-alimentaire aux intérêts financiers contraires à la solidarité nationale nécessaire en matière de santé. La reconnexion du sanitaire avec le social s’inscrit ainsi dans une volonté de réorientation des territoires ruraux dans tous les domaines économiques et sociétaux.