
Projet de loi de finances pour 2020 – Nouvelle Lecture
Le Projet de loi de finance revient aujourd’hui à l’assemblée en deuxième lecture. Les travaux préparatoires de la commission vendredi ont donné le cap : les grandes lignes du projet du gouvernement devraient être confirmées. Ces grandes lignes, nous les avions déjà mises en évidence lors de la première lecture : derrière une communication axée sur le pouvoir d’achat, vous continuez à détricoter l’État social et à favoriser les mêmes qui ont été les grands gagnants de la première partie du mandat. Il est vrai que le contexte social vous a ébranlé depuis le début de la crise des gilets jaunes, il y a quasiment un an. Il était désormais temps d’opérer une pirouette, de faire mine d’avoir changé de cap. Dès lors, les grandes annonces sont tombées.
D’abord, la poursuite de la suppression de la taxe. Ce PLF prévoit ainsi pour 2021 l’extension à tous les foyers de la suppression de taxe d’habitation. Selon vos dires, ce sont 8 milliards de pouvoir d’achat supplémentaire. Mais faut-il rappeler que ces 8 milliards d’euros profiteront aux 20% des ménages les plus aisés ?
Ensuite, la baisse de l’impôt sur le revenu pour la deuxième tranche. En tout, ce sont 5 milliards d’euros d’impôt en moins pour ce que vous appelez les ménages modestes. Mais faut-il rappeler que 50% des ménages ne paient pas l’impôt sur le revenu ? Comment justifier qu’un célibataire gagnant 6500 euros paiera moins d’impôt ?
Dans ce grand nuage de fumée, on aura également du mal à comprendre dans quelle mesure la baisse de l’impôt sur les sociétés à 28% en 2020 et à 26,5% en 2021 favorisera le pouvoir d’achat. Cette mesure favorisera plutôt les grandes entreprises que vous avez déjà chouchoutées avec la baisse des cotisations patronales.
En fait, derrière l’argument du pouvoir d’achat que vous ne cessez d’étaler, votre idéologie transparait : il faut moins d’impôts, moins de ressources pour l’État, pour pouvoir ensuite rogner dans les dépenses. Personne ne s’y trompera : en parallèle de vos soi-disant mesures sociales, pas question de mettre à contribution les plus aisés, ce sont bien les petits qui paieront.
Ils paieront lorsque vous irez rogner un peu plus les APL.
Ils paieront lorsque vous aurez réussi à glaner quelques euros sur les allocations des chômeurs.
Ils paieront lorsque les collectivités, faute de compensation à hauteur de la taxe d’habitation, devront réduire les services publics de proximité.
Plus largement, ils paieront lorsque les prestations de la sécurité sociale seront amenées à baisser parce que, pour la première fois depuis 1994, votre gouvernement ne compensera pas les exonérations de cotisations à la sécurité sociale.
Fidèles à vos valeurs donc, vous continuez à détruire les poches de solidarité qui font la force de notre pays au profit d’un individualisme accru. Vous construisez progressivement une société sans impôt, qui ne permet plus à l’État de pouvoir agir efficacement et de relever les grands défis.
La preuve la plus flagrante de ce manque d’ambition concerne les mesures écologiques de ce projet de loi. Le crédit d’impôt pour la transition énergétique devenu prime écologique voit son montant baisser de 900 à 800 millions d’euros, alors qu’il était encore de 1,6 milliards d’euros en 2017. Pour tenir nos ambitions en termes de climat, il faudrait rénover près de 500 000 logements par an. Comment tenir un tel objectif alors qu’avec 900 millions d’euros l’année dernière, seuls 250 000 logements ont été rénovés ? Dans ces conditions, il vous sera impossible de tenir les engagements climatiques de notre pays alors qu’habituellement, vous êtes si prompt au respect des engagements budgétaires.
Dans ce nuage d’imposture, notre groupe s’efforcera, comme à son habitude, de tracer une autre voie, plus juste et plus solidaire.
Nous proposerons ainsi une réforme qui augmente la progressivité de l’impôt sur le revenu, pour que la baisse que vous avez consentie ne soit pas payée par les plus modestes.
Nous nous opposerons également à la suppression de la taxe d’habitation pour les 20% de ménages les plus aisés car cette mesure détériora la soutenabilité financière des départements, qui sont le fer de lance de l’action sanitaire et sociale dans notre pays.
En baissant de manière généralisée les impôts, en particulier ceux des plus aisés, vous vous liez les mains pour pouvoir justifier le détricotage de l’État social et votre inaction en termes de climat. Au contraire, nous aurons à cœur durant cette deuxième lecture de proposer un projet donnant à l’État tous les moyens d’action dont il doit disposer pour répondre aux défis sociaux et écologiques auquel il doit faire face. Nous ne voterons bien entendu pas pour ce projet de budget.
Intervention du lundi 16 décembre 2019